Deux années de travail, 225 acteurs et des centaines de figurants, 156 lieux de tournage et plus de 2 300 techniciens et fournisseurs. Au final, douze épisodes déjà vendus dans une trentaine de pays. Et au Roma Fiction Fest, qui s’est achevé le 19 septembre 2014, la série vient d’obtenir le prix de « Meilleur produit Italien »
Gomorra, la série, est issue du best seller de Roberto Saviano « Gomorra, dans l’empire de la Camorra » (Gallimard,2007). Un titre qui rappelle la Genèse et la ville de Gomorrhe punie par Dieu d’une pluie de feu en raison des mauvaises mœurs de ses habitants. Astucieux, le titre est calqué sur le nom de la Camorra, ce phénomène mafieux affectant depuis le début du 19e siècle les quartiers de Naples et une partie de la Campanie.
Gomorra – le livre
Trafic d’armes, règlements de compte, drogue, déchets toxiques et contrefaçon, composent cette fresque sociologique aux allures de roman policier, racontée à la première personne par un auteur-enquêteur prêt à tout pour infiltrer les rouages du crime organisé dans les banlieues de la cité parthénopéenne.
Publié en 2006, l’ouvrage du jeune napolitain (27 ans à l’époque), écrivain, journaliste, philosophe, a d’emblée connu un succès foudroyant : deux millions cinq cent mille copies en Italie, et dix millions à travers les cinquante-deux pays dans lesquels le livre a été traduit. Des récompenses à la pelle, et la nomination par le New York Times dans sa liste des 100 livres les plus importants de 2007.
Un succès qui a valu à l’auteur de s’attirer les foudres des grandes familles camorristes (et notamment du « Clan des Casalesi« ) plus soucieuses de discrétion que de publicité, et subitement mises en lumière à la face du monde par un succès éditorial auquel personne ne s’attendait.
La riposte ne s’est pas fait attendre : Saviano désormais menacé de mort a dû quitter l’Italie et vit jour et nuit sous escorte policière.
Gomorra – le film
Après une adaptation pour le théâtre, Gomorra est porté a l’écran en 2008 par Matteo Garrone. Un film choc, un reportage-fiction ultra réaliste dans lequel alternent divers personnages protagonistes de différentes histoires. Le réalisateur italien reçoit le Grand Prix du jury au Festival de Cannes, se classant ainsi définitivement au panthéon des grands du cinéma italien d’aujourd’hui, et éveillant une curiosité internationale pour le livre de Saviano et pour son courageux auteur, promu au rang de héros national aux yeux de nombre de ses concitoyens parmi lesquels le romancier Umberto Eco.
Outre le Grand Prix du Jury, Gomorra raffle en 2009 le « David di Donatello » , le « Ruban de l’année » au « Nastro d’Argento » , le prix du meilleur film au « Globo d’Oro » (auquel Toni Servillo reçoit par ailleurs pour le même film le prix du « meilleur acteur »). Et aux Césars 2009, Gomorra sera nominé meilleur film étranger.
Gomorra – la Série
Une première saison en douze épisodes au scénario co-écrit par une équipe de six rédacteurs parmi lesquels Saviano lui-même, et réalisée par Stefano Sollima à qui l’on doit déjà la série « Romanzo criminale » . Une saison avec pour trame l’histoire du règlement de compte sans merci entre clans, qui resta dans l’histoire locale sous le nom de « Faida di Scampia » .
Une partie du tournage a précisément eu lieu dans le quartier difficile de Scampia, proche de Secondigliano, à moins de dix kilomètres du centre de Naples. Douze épisodes composées d’images choc, sombres, brutales, dans lesquelles on reconnaît les « Vele di Scampia » , ces immeubles triangulaires, en forme de voiles, ou de pyramides, construits dans les années 1960 et 1970 et qui servaient déjà de cadre au film de Garonne.
Dans ce décor irréel, dégradé et sordide, sont mises en scène les activités mafieuses du clan Savastano, conduit d’une main de fer par le boss Don Pietro Savastano (Fortunato Cerlino), en conflit avec le parrain concurrent sur le territoire, Salvatore Conte. Le quotidien d’un « boss », entouré de sa femme Donna Imma (Maria Pia Calzone), de son fils Gennaro (Salvatore Esposito) au caractère un peu trop faible, et de son lieutenant et successeur potentiel Ciro di Marzio, (Marco D’Amore).
L’histoire tirée du livre, celle d’une lutte sans pitié, permet au spectateur, comme elle l’a permis au lecteur avant lui, de se plonger dans les méandres et les rouages d’une des organisations criminelles les plus terribles, et d’en découvrir les mécanismes de fonctionnement.
Diffusée sur Sky Italia en 2014, la série est présentée en 2015 sur Canal +. Le 19 septembre, elle a obtenu le prix de la meilleure réalisation italienne à la Roma Fiction Fest.